États Généraux du Rail et de l'Intermodalité.
A l'occasion de la réunion qui se tenait hier à Mende dans le cadre des états généraux du rail et de l'intermodalité (initiés par la Région LRMP), la Présidente et les élus ont remis à M. Gibelin (vice-président en charge des Mobilités et infrastructures transports) la contribution du Département.
Retrouvez également ci-dessous la Contribution du Département de la Lozère :
Au nom des Lozériennes et Lozériens, nous tenons à remercier la Région Languedoc-Roussillon Midi Pyrénées pour le lancement des Etats Généraux du Rail et de l'Intermodalité.
Cette consultation élargie fait suite, dans les meilleurs délais, à un engagement fort pris par la Majorité régionale lors des élections régionales. Elle est pour les Lozériennes et les Lozériens particulièrement bienvenue, pour quatre raisons essentielles :
Elle affirme clairement le rôle majeur du rail demain dans une Région comme la nôtre, au moment même où la pertinence du transport ferroviaire est souvent contestée. Elle ambitionne, à travers ces États Généraux, « d'améliorer la qualité de l'offre de service public des transports » et veut « aller plus loin avec l'arrivée de la grande vitesse, le renouvellement du TER, le développement du fret, l'essor de la mobilité douce, le transfert, par la Loi NOTRe, des compétences des transports interurbains et scolaires » (la Présidente Carole Delga) et, ainsi, permettre une harmonisation et une amélioration des services réguliers et scolaires, un désenclavement physique garantissant l'attractivité et l'équilibre du territoire régional LRMP.
Elle s’adresse à tous les habitants de la Grande Région, y compris celles et ceux d'un département périphérique et excentré comme la Lozère, en affichant la volonté de construire une Région forte, solidaire et attractive et d'assurer son rôle en matière d'aménagement du territoire mais avec l’État qui, selon nous, ne doit pas se désengager, car il est le garant de l'égalité réelle des citoyens dans toute la République.
Compte-tenu des déplacements indispensables mais longs et compliqués dans un département de montagne comme le nôtre (où les conditions de circulation par route sont particulièrement difficiles en hiver), le développement des transports collectifs est actuellement trop faible mais reste une priorité sociale pour éviter l’isolement des personnes, notamment de celles à faible revenu et/ou à faible mobilité.
Dans les départements ruraux de montagne, quand il n’y a pas de transport collectif, l’obligation de posséder deux véhicules par famille impacte fortement le pouvoir d’achat des ménages.
C’est donc dans un état d’esprit constructif que le Département de la Lozère propose sa contribution à ces États Généraux, conscient, ce faisant, de préparer au mieux son avenir dans la Région LRMP.
Dans un département très rural, très peu peuplé (environ 77 000 habitants), avec une très faible densité démographique (15 habitants au km2 en moyenne), 1 000 mètres d'altitude moyenne (la plus élevée de France en raison de la prédominance de hauts plateaux), une très grande dispersion de l'habitat (environ 2 000 lieux habités), et aujourd’hui encore, très enclavé, les seuls moyens de déplacement sont le RAIL et la ROUTE.
Ni port, ni aéroport, ni même LGV !
– 2 lignes ferroviaires radiales (TET, TER + FRET) AUBRAC et CEVENOL, dont l'avenir même est en jeu en ce moment. Les deux lignes sont reliées par une transversale « Translozérienne » La Bastide/Mende/Le Monastier, desservant le chef-lieu de la Lozère.
– Plus qu’une seule circulation ferroviaire journalière entre Mende et le Monastier.
– Vitesse de 40 km/h sur une partie du tronçon Mende–La Bastide.
Dans les faits, chaque décision prise par la SNCF rend le train encore moins accessible et moins attractif.
Les problématiques souvent mentionnées par les usagers et les associations de défense de ces lignes sont :
Une remarque liminaire : nous dressons un constat très négatif de l'activité ferroviaire en Lozère (« faible trafic », « train pas attractif », « desserte peu compétitive », etc.), mais cela ne suffit pas. Il faut s’interroger sur les raisons de cette situation : vétusté des infrastructures ainsi que des matériels roulants, d’où un allongement des temps de parcours (ex : le temps du trajet en TER Mende/Nîmes est aujourd’hui supérieur à celui du trajet Mende/Montpellier en… 1992 !)
(annexe n°1) ; pénurie de conducteurs formés et de matériels en état ; sous-capacité chronique les jours de pointe ; incidents et retards incessants entraînant des correspondances irrégulièrement assurées ; guichets de gares fermés ; promotion et communication (y compris sur Internet) très déficientes, voire totalement absentes, etc.
Si l'on est dans cette situation c’est que la SNCF joue de moins en moins le jeu et même « organise la désorganisation ». Un exemple révélateur : suite à un éboulement sur la voie ferrée à Alleyras (Haute-Loire) survenu le 28 avril 2015, il a fallu attendre le 2 septembre 2015 pour la prise de décision et le 15 décembre 2015 pour la reprise du trafic, près de 8 mois après !
La convention TET État/SNCF avait fait naître de grands espoirs pour la pérennisation de ces lignes, mais ils ont été déçus car les engagements n'ont pas été tenus et le déficit d'exploitation n’a cessé de croître (annexe n°2) Rappelons que la Commission Permanente du Comité de Massif, dans sa réunion du 19 juin 2015, estimait « qu’il s'agit d'une ligne d'intérêt supra-régional indispensable à l'aménagement et au développement du Massif Central » et que « la ligne Clermont-Ferrand doit être prolongée en Paris-Clermont-Marseille, la rupture actuelle de charge à Nîmes ne correspondant pas à un objectif national d'aménagement du territoire qui polarise les flux à partir des grandes métropoles françaises et pas seulement Paris ».
Les décisions de la SNCF mettent en évidence la volonté de fragiliser la politique de l’État en faveur des TET.
L’offre ferroviaire, si la concurrence n’est pas faussée, est et demeure la plus pertinente en zone de montagne, parfois même la seule en l'absence d'alternative valable (comme le reconnaît le rapport Duron pour le Cévenol par exemple). Là, le trajet en train est le plus court, le moins sinueux, donc le plus confortable, le plus sûr et le plus respectueux de l'environnement. Donc, ici, ce n'est pas le bus ou le camion mais bien le train qui est et qui reste la solution d'avenir, à la seule condition de lui donner vraiment sa chance ! Et pourtant, la SNCF oublie le département rural de la Lozère dans sa programmation d’aménagements et de mise en place de services.
Concernant la mise en service récente par Isilines d'une liaison Clermont/Nîmes par autobus , à prix cassés : elle se fait par Montpellier, donc sans desserte fine des territoires et sans souci de l'aménagement de ces derniers.
Concernant le projet de liaison Mende/Montpellier par autobus portes fermées par l'A 75 : ne vaut-il pas mieux améliorer la liaison fer existante par La Bastide/Villefort/Génolhac/La Grand'Combe/Alès/Nîmes (permettant de desservir, outre Mende et sa région, tout l'Est lozérien mal irrigué par les routes, ainsi que les Cévennes gardoises), un trajet qui se parcourait en 3h 05 en 1992.
Avantages du train : il circule sur des voies dédiées jusqu’au cœur des agglomérations, à vitesse toujours constante (donc potentiellement plus ponctuel) et par tous les temps (particulièrement important en zone de montagne).
1° - Infrastructures et moyens (points de vigilance et propositions)
– Priorité au maintien, à l'amélioration ou à la remise en service des liaisons ferroviaires vers Montpellier, Toulouse, Clermont et Marseille (cf. position du Comité du Massif Central, supra).
– Quel avenir des TET, suite au rapport Duron et à la mission en cours confiée par l’État au Préfet Philizot, avec des problématiques particulières à l'Aubrac (fret pour l'usine sidérurgique de Saint-Chély d'Apcher et projet d'implantation de la Légion sur le Larzac) et au Cévenol (+ Alès/Bessèges).
– Nouvelle convention État/SNCF ? Si gouvernance interrégionale, dans quelles conditions et avec quelles compensations financières par l’État ? Les TET doivent garder leur statut national.
– Nouvelle convention Région/SNCF, en cours de renégociation, pour les TER ? Nécessité de revoir l'offre entre la Bastide et Mende pour la rendre plus attractive par rapport aux horaires.
– Étoile ferroviaire de Séverac : relations de la Lozère avec Toulouse, chef-lieu régional ? Aménagement de la section Rodez/Séverac ?
– Parcs de matériel roulant ? Renouvellement plus fréquent du matériel roulant.
– Gros entretien et régénération des lignes, pendant la durée du CPER 2015/2020 ? et au-delà, qui les assurera ?
2° - Services (points de vigilance et propositions)
Lors du changement de majorité, le Département a lancé une réflexion globale sur la mobilité en Lozère, afin de répondre à certains besoins urgents de déplacements quotidiens exprimés par la population.
Les sujets prioritaires identifiés sont :
La constitution d’une offre cohérente de lignes régulières de transport en commun, s’appuyant sur les conclusions d’une étude conjointe Région Languedoc Roussillon / Département de 2011 de coordination des offres ferroviaires et routières ; autrement dit la concurrence Rail – Route devra être évitée, notamment grâce à des horaires harmonisés. 5 à 6 lignes pourraient être mises en place, partant de Mende pour desservir les principales agglomérations du territoire. À ce jour une seule ligne expérimentale reliant Mende à Florac et bientôt Alès, fonctionne sous maîtrise d'ouvrage départementale
Le développement du transport à la demande (TAD) qui est un mode de déplacement particulièrement adapté aux territoires ruraux, et qui doit constituer un élément majeur de déplacement des personnes isolées, mais aussi d’outil de rabattement des usagers sur les transports en commun structurants que sont les TER, TET et les lignes régulières de transports routiers. Actuellement, 14 conventions lient les communautés de communes lozériennes au Département pour l'offre TAD. Le périmètre et les cibles de ces services devront être revus.
La mise en œuvre d’un schéma de navettes touristiques, dont deux seront en expérimentation dès cette année
Le développement du covoiturage dans le cadre du programme Territoire à Énergie Positive pour la Croissance Verte (TEPOSCV), avec la mise en place d’un schéma d’aires de covoiturage ; le programme complet comporte 23 aires à construire
La mise en place d’outils favorisant l'intermodalité, l'information et les conseils de mobilité à la population. Comme l'a recommandé le CESER Languedoc-Roussillon dans son étude de 2015, il est souhaitable que la Région prenne en charge cette problématique ; le Département de Lozère, par sa connaissance fine, pourra apporter son expertise à ce projet qui doit être de dimension régionale.
Les transports scolaires tiennent en Lozère une place particulière dans les déplacements de nos jeunes enfants (4 500 élèves) mais aussi contribuent à maintenir des familles dans les zones rurales de notre territoire. Il est souhaitable que la Région, qui détiendra désormais les compétences de cette mobilité, affiche autant d'ambitions que le Département en matière de desserte fine du territoire, notamment en maintenant la règle des « 3/3/3 » permettant de créer un service de transport lorsque 3 élèves de plus de 3 ans habitent à plus de 3 km du lieu de scolarisation. Aujourd’hui, le réseau de transport scolaire est constitué d'environ 255 services.
Les points de vigilance et propositions :
La présente réflexion devra prendre en compte le tout récent accord (19 avril 2016) en « trilogue » (Commission, Conseil et Parlement Européens) sur le « 4ᵉ paquet ferroviaire » (cf. Le Monde du 30 avril 2016). S’il renforce les pouvoirs de l'Agence Ferroviaire Européenne, il repousse, de fait, la libéralisation du rail dans l'Union.
Les États ont pesé de tout leur poids, notamment l'Allemagne et la France (les 2 plus gros marchés ferroviaires) pour préserver l'organisation intégrée de la Deutsche Bahn et de la SNCF (avec SNCF Réseau et SNCF Mobilités réunis dans un même groupe ferroviaire unique). Ainsi, la France n'aura pas à retoucher sa réforme du secteur adoptée en 2014.
L’État va garder la main sur l'ouverture à la concurrence, laquelle dépendra de la volonté politique de l’État et pourra, de fait, être repoussée jusqu’en 2033/2034.
Alors même qu’il a transféré aux Régions la gestion des trains, la France a obtenu que l’État codécide avec les Régions si elles souhaitent ouvrir à la concurrence
La question des transports est au cœur d'enjeux essentiels (climat et environnement, santé publique, aménagement du territoire, enjeux sociaux et économiques) et doit donc tenir une place centrale dans le débat politique.
L’État et les Régions doivent donc, en cohérence, assumer et développer leur rôle d'Autorités Organisatrices des Transports. La Loi NOTRe donne désormais à la Région les moyens juridiques et organisationnels pour œuvrer dans ce sens.
Sophie Pantel, Présidente du Conseil départemental
Henri Boyer, Vice-président de la Lozère délégué aux infrastructures, désenclavement et mobilités